De nombreux coachs et marketeurs se sont emparés avec avidité d’un terme que le 20e siècle industriel et individualiste avait progressivement vidé de sa substance. Merci, ce petit mot trop souvent négligé ou marmonné distraitement, fait aujourd’hui son grand come back dans la sphère professionnelle.  Des concepts comme « l’économie du merci », « le marketing de la gratitude » témoignent d’un regain d’intérêt pour une vision plus humaniste de  la société.

Etymologie

Avant de revêtir le sens que nous lui connaissons aujourd’hui, le mot merci fut d’abord

  • un salaire, une récompense (du latin merces, edes)
  • une faveur, voire la grâce qu’on accorde à quelqu’un en l’épargnant.
  • dans le vocabulaire courtois, la merci (notez le féminin !) désignait une faveur amoureuse, l’amour d’une dame. Ce sens est à rapprocher du verbe latin merere «gagner, mériter».
  • à l’époque féodale, l’expression «à merci» signifie à volonté, à discrétion et fait référence à l’état de dépendance du serf par rapport à son maître (à la merci du seigneur).

Enfin, attesté dès le XIIe siècle, l’emploi de merci comme interjection pour exprimer un sentiment de gratitude nous est sans doute le plus familier.

As we express our gratitude, we must never forget that the highest appreciation is not to utter words, but to live by them.” ~ JF Kennedy

La magie d’un merci

Réfléchissez un instant : combien de fois vous a-t-on dit « merci » aujourd’hui ? Combien de fois l’avez-vous dit vous-même ? Je ne parle pas du merci de convenance, murmuré du bout des lèvres sans y penser ni du merci de convenance, anonné en pilote automatique. Je parle du MERCI qui vient du cœur, du MERCI chargé d’émotion sincère et d’empathie authentique et profonde.

Est-ce qu’un tout petit mot, et l’état d’esprit qui l’accompagne, ont le pouvoir de changer votre vie ? Oui, affirme la journaliste chevronnée Daborah Norville qui démontre que l’influence de la gratitude est quantifiable, tant physiquement qu’émotionnellement. Vous voulez être en meilleure santé, plus optimiste ou encore surmonter les périodes difficiles ? cela est possible pour qui sait reconnaître les bonnes choses de la vie.

Je parle de ce « MERCI » qui donne sens à la vie en société : main tendue, sourire qui illumine un regard, parole bienveillante qui met du baume au cœur ou encore reconnaissance du service rendu. Je parle de ce cercle vertueux qui rend nos relations plus intenses ; de cette mise en valeur des personnes qui les amène à briller plus encore. La psychologie, la psychanalyse et les neurosciences l’ont bien compris : la gratitude est une vertu essentielle, l’une des plus « humanisantes » sans doute.

Avez-vous la gratitude-attitude ?

Ressentir de la gratitude et ne pas l’exprimer, c’est comme emballer un cadeau et ne pas le donner. William Arthur Ward

Depuis notre plus tendre enfance, nous avons appris à dire «merci». Inlassablement, nos parents nous l’ont répété en maintes circonstances: « Dis merci ! »Pourtant, bien des années plus tard, dans nos cercles d’amis et dans nos milieux du travail, que reste-t-il de ces « merci » ?   Combien de fois prenons-nous encore le temps de dire « merci » à une connaissance? Ou d’envoyer un email de remerciement à un collègue?

La notion de gratitude fait partie intégrante de notre système éducatif et est un élément clé de toute relation interpersonnelle harmonieuse. Comment expliquer alors cette désaffection progressive? Notre société souffre d’un TDG (trouble déficitaire de la gratitude) généralisé: c’est une véritable épidémie mondiale.  Nous avons progressivement oublié de nous réjouir de ce que nous considérons comme des acquis : une famille, un toit, un emploi, la santé. Or, en ces périodes de crise où nous sommes assaillis par tant de messages négatifs, nous aurions bien besoin de retrouver la gratitude-attitude pour aller de l’avant et sortir du cercle vicieux du stress et de l’isolement.

La gratitude au travail : une stratégie rentable

Plusieurs études l’ont prouvé: la gratitude nous fait du bien, si du moins elle est sincère et authentique. Car elle génère du positif en nous et autour de nous.  Elle renforce les liens sociaux et procure un sentiment de bien-être durable. Mais la gratitude, comme tout autre sentiment, peut se comparer à un muscle : elle se renforce si nous l’exerçons, elle s’atrophie, si nous la délaissons.  Alors, qu’attendons-nous pour nous y (re)mettre?

La gratitude au travail repose sur deux principes essentiels: la gratuité et l’échange gagnant-gagnant entre les partenaires. Elle promeut le partage de savoirs et d’expériences nécessaires à la construction d’une communauté engagée autour d’un projet ou d’une entreprise.

Témoigner sa gratitude va au-delà du simple fait de dire merci. «C’est nommer toutes les actions qui ont eu un effet positif pour moi, mais c’est aussi expliquer son ressenti et l’impact que cela a eu pour moi». Par exemple, il ne s’agit pas de se contenter de remercier son collègue de nous avoir envoyé son rapport, mais de dire: «Ton rapport était précis et complet, ce qui m’a permis de gagner du temps dans la préparation de ma réunion et d’y assister sans me stresser à l’idée que l’on puisse me poser une question dont je ne connaîtrais pas la réponse.»

La gratitude n’est pas un concept nouveau en soi, il a simplement été remis au goût du jour. L’entrepreneur Gary Vaynerchuk est l’un des premiers à en parler dans son livre « The Thank You Economy ». Il y replace le marketing relationnel au cœur du processus de vente, sur internet comme dans le commerce physique.

L’avènement du merci 2.0

L’avènement des médias sociaux et du web 2.0 est une des manifestations les plus intéressantes du grand retour de la générosité et de la gratitude. Car, comme le dit si bien Gary Vaynerchuck dans son premier chapitre : « Tout a changé, sauf la nature humaine » !

Pour tirer parti de ce changement, les entreprises [et les hommes en général] doivent regarder en arrière et étudier la manière dont leurs grands-parents prenaient soin de leurs clients [et de leurs relations], faute de quoi ils se feront dépasser par leurs concurrents.

Il y a bien sûr plusieurs façons de partager et d’aider les autres à progresser, dans la vie comme sur les réseaux sociaux.  Mon propos ici n’étant pas de les détailler, je vous propose en fin d’article une infographie qui suggère 6 méthodes appliquées aux réseaux sociaux.

Vers un commerce plus humain

Quand philanthropie et commerce se rencontrent, cela  peut donner un business model tout à fait novateur, à l’exemple de celui du magasin Merci à Paris. Et cela donne une nouvelle dimension au « merci » du 21esiècle.

Ni charity store, ni grand magasin ; pas même concept-store. Merci, l’enseigne créée par Marie-France Cohen, ne rentre dans aucune case. Et pour cause, le concept est à l’image du lieu et de son offre : inclassable. Atypique à force d’éclectisme et de métissage des cultures et des tendances. A commencer par sa double finalité, commerciale et philanthropique. Pour remplir sa vocation première – financer des projets sociaux par le biais d’une fondation –, Merci doit d’abord dégager des bénéfices. D’où la nécessité d’appuyer le concept et son fonctionnement sur un business model solide ; apte, comme le résume la fondatrice, “à en faire un succès commercial pour, ensuite, redonner”.

“Les gens ne vont pas chez Merci pour faire une b.a. La dimension vertueuse de l’achat est un plus et c’est là toute la force de la marque. La particularité de Merci tient d’abord dans ce caractère atypique qui fait qu’il ne s’agit ni d’un charity store – qui, comme Emmaüs, vend des articles de “seconde main” – ni d’un magasin traditionnel, mais du premier concept store solidaire.”

Vers une nouvelle forme de marketing :  « le soft marketing ».

Le « soft marketing » privilégie les solutions où la logique du gagnant-gagnant domine (pour l’entreprise ET les clients). Il stimule les interactions et les relations avec les clients. Pas question de vendre à n’importe quel prix pour satisfaire des objectifs à court terme. C’est la capacité à susciter l’engagement des clients qui fait progresser l’entreprise.

Dans un livre récent (2015), intitulé «Gratitude Marketing», Michael Sciortino explore à son tour comment le fait d’aider les autres, d’exprimer sa gratitude, et d’utiliser la règle de réciprocité permet de mettre en valeur son entreprise. Pour lui, faire le bien, non pas pour des raisons égoïstes mais de façon systématique et cohérente, est remarquablement bon pour les affaires. De même, faire en sorte que les clients se sentent appréciés et compris est bon pour le business.

En conlusion

Les neurosciences le proclament à qui veut l’entendre : pratiquer la gratitude au quotidien est un gage de bonne santé physique et relationnelle.  Donner de soi après avoir reçu nous aide à résister au stress, mais aussi à prendre conscience que nous avons besoin des autres pour exister. Exprimer sa gratitude, c’est retrouver le mouvement naturel des relations humaines ; c’est diriger son attention vers les autres et se détacher d’un « je-me-moi » surdimensionné.

Bref, ces cinq petites lettres M.E.R.C.I vous feront  entrer dans une relation plus chaleureuse au monde et aux autres. Essayez ! C’est tout le bien que je vous souhaite !

MERCI pour votre attention 🙂